J'étais un tout jeune homme quand je suis devenu Papa. Je dis "Papa" et non père, car ce sont les mots des enfants qui comptent. J'écris Papa, avec une majuscule, parce que depuis que je suis Papa je n'ai plus vraiment besoin de prénom.
Je suis devenu Papa comme on répond à un appel. C'était un cri, une délivrance... un élan ! C'était un caprice, un pari. Je ne pouvais pas savoir que tout se passerait bien. En réalité si : je le savais parfaitement, là, tout au fond de moi. Ne me demandez pas comment. Je le savais, c'est tout. Sans doute ai-je tellement ignoré le reste que j'ai su voir l'essentiel.
Je suis devenu papa avec l'intuition que cela, je saurais le faire. Pour la première fois je n'avais pas peur. Je suis devenu Papa avec une titubante et infinie confiance. Je suis devenu Papa de toute mon intuition. J'ai beaucoup d'admiration pour les parents qui n'avaient pas cette évidence chevillée au cœur, pour leur courage - moi qui n'ai pas eu besoin de courage pour devenir Papa, seulement d'insouciance.
Je suis devenu Papa dans des circonstances qui auraient fait renoncer n'importe quelle homme doté d'un soupçon de raison. Je m'en fichais éperdument. Je n'ai écouté que mon instinct. Quand la raison se fait fumée, l'instinct devient la seule branche solide. Être Papa, c'était bon et doux ; c'était un baume apposé sur une contusion de date ancienne ; c'était un filtre aux mille couleurs déposé devant mon regard. Je suis devenu Papa et je me suis réconcilié avec le temps présent et à venir.
Devenir Papa relève d'une décision intime et personnelle. On accède à la parentalité à deux, certes, mais on peut devenir Papa au fond de soi seul - je le sais, je l'ai vécu, une fois. Ensuite seulement j'ai su partager ce privilège, trois fois.
Je suis devenu Papa quatre fois, quatre fois pour la première fois. La vie n'a pas été avare avec moi : je suis le Papa bienheureux de quatre enfants, tous différents, chacun extraordinaire.
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Je suis devenu Parrain sur le tard. J'écris Parrain, avec une majuscule, parce que j'entends cette majuscule quand elles m'appellent Parrain et que ce sont, là encore, les enfants qui décident.
Et puis, ça me fait un deuxième prénom. Papa, Parrain.
Je piaffais d'impatience, mais cette joie-là n'était pas de mon ressort. J'attendais en vain qu'on vînt me solliciter. Las ! devenir Parrain se reçoit mais ne saurait se demander ! Je ne décidai donc de rien et goûtai le sel de l'attente.
Le temps a passé. Et puis en une poignée d'années deux de mes sœurs m'ont demandé de devenir le Parrain de leur benjamine. J'ai d'abord pleuré d'une émotion plus grande que moi. Ensuite, j'ai fait ce que je savais faire : j'ai pris soin de mes filleules, à ma mesure ; et j'ai joué avec elles, à ma démesure. Au-delà de la mission de (modeste et discrète) sentinelle qui est la sienne, un Parrain doit essentiellement savoir s'amuser. Il faut s'allonger sur le sol, une peluche dans la main gauche, un kapla dans la main droite, et ne penser qu'à inventer, interpréter, vivre, raconter des histoires. Chaque jour passé sur terre mérite son lot d'un millier d'histoires.
Je suis l'heureux Parrain de deux filleules vives et adorables. J'en suis honoré et fou de joie. Elles ont en commun d'être citadines, et je leur apporte des morceaux de ma campagne que nous plantons à quatre mains dans leur petit jardin. Je partage avec elles ma fantaisie, mon enfance éternelle, mon imagination à fleur de rêve. En retour, mes filleules me font le présent d'une altérité souriante, qui renverse mes vérités vacillantes. Quelle chance que la mienne ! Quelle confiance que la leur !
Je n'aurai évidemment pas assez d'une vie pour remercier mes sœurs de m'avoir choisi pour revêtir aux yeux de leur enfant le costume du rire bienveillant, alors cet article sera une bonne occasion de commencer ce travail de Sisyphe.
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Être Papa puis Parrain, c'est recevoir la vie après l'avoir donnée.
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Voilà, c'était le centième. Centième article publié sur ce blog. Merci sans compter à toutes mes lectrices et lecteurs. Sans vos yeux pour les lire, mes phrases résonneraient dans le vide. Vous me donnez foi et confiance dans la beauté du monde et des mots.
Bonsoir Papa Pierre. S'allonger sur le sol pour jouer à marchand de rêves, c'est un peu dur quand on est Papy, mais j'y arrive encore. C'est un bon remède pour oublier ses douleurs. Garde confiance Papa Pierre une partie de la beauté du monde passe par tes mots si justement emboités en belles phrases pour notre plaisir de les lire. Mes amitiés Pierre et bon week-end
RépondreSupprimerLe remède de la jeunesse éternelle, cher Michel, c'est d'oublier qu'on a vieilli. Nul doute que tu y parviens. Et mieux encore quand tes petits-enfants t'y incitent.
SupprimerC'est une belle expression que "Garde confiance". C'est une chose à souhaiter, je trouve.
Merci encore de me faire (modestement) participer à la beauté du monde.
Heureux premier mai, Michel, entre fleurs et douceur !
Pierre.
Coucou Pierre
RépondreSupprimerOn dit toujours qu'être parent est le plus beau des cadeaux, je ne suis pas sure de cette doctrine car rien n'est plus hasardeux que le rôle de parent, plus difficile, mais apparemment ce rôle te convient si l'on ajoute à celui ci le titre de parrain c'est encore plus valorisant
Etre entouré d'enfants n'est-ce pas le symbole de la vie après tout
La paternité est une excellente chose pour faire grandir les hommes
Très joli week-end du 1er mai, le muguet arrive
des bises
Coucou Christine,
SupprimerEn fait, je crois qu'être Papa est l'essence de ma vie, tout simplement. Je m'oublie volontiers au passage, et c'est sans doute un tort. Mais je ne sais pas faire autrement, alors...
Et oui, ça m'a incontestablement fait grandir, d'un coup, mais sans douleur.
Le muguet est trèèèès timide dans mon jardin. Les clochettes sont encore bien vertes.
Bon premier mai Christine !
Pierre.
Cher Pierre Papa Parrain,
RépondreSupprimerMerci pour ce bel article. La confiance dans la vie est une qualité si importante.
Bon week end.
Oh ! merci ! Oui, la confiance change complètement notre regard sur le monde, qu'on en soit le sujet ou l'objet.
SupprimerBon week-end - muguet et pluie.
Pas d'école, pas d'enseignement, pas d'examens non plus et pourtant n'est ce pas le plus beau métier du monde puisque il n'est régi que par l'amour et le coeur . Bonne journée parfumée entouré (j'espère) de tes quatre clochettes.
RépondreSupprimerIncontestablement.
SupprimerOui, je suis entouré de mes quatre clochettes ! Le muguet, lui, est le grand absent de la journée. Va-t-il éclore cet après-midi ? C'est déjà arrivé, alors je guette.
Bon week-end !
Pierre.
Pierre, papa et Parrain ! Tout un programme en P comme parfum...d'enfance bien sûr puisque c'est parmi les enfants que tu sembles t'épanouir spontanément.
RépondreSupprimercent articles ? Quoi, quoi, quoi ? En aurais-je loupé une partie?
Et oui, cent ! Par vagues irrégulières, avec quelques reflux et quelques grandes marées ! Je n'y croyais pas moi-même.
SupprimerBonne journée Capucyne - muguet à volonté.
Pierre.
j'aime tout dans ton texte, et pourtant, je ne suis pas Papa �� mais Mam, et comme toi, 4 fois, 4 fois différemment, et 4 fois mon coeur a grandi..
RépondreSupprimerje n'ai pas ton esprit littéraire, je suis plutôt cartésienne, mais je l'apprécie fortement!
passe un bon samedi férié avec tes enfants���� et bon 100ème!
C'est amusant, quand j'étais enfant j'avais reçu l'étiquette (on faisait ainsi dans ma famille) de scientifique. J'adorais les maths, elles me le rendaient, alors "on" avait déduit qu'a contrario les lettres n'étaient pas mon truc.
SupprimerJe me suis mis à écrire sur le tard, sans conviction. Le plaisir est venu très vite. Aujourd'hui je n'imagine pas un jour sans écrire.
Bon samedi, merci pour le centième, profite bien de la pluie revenue ! Amitiés,
Pierre.
Cher Pierre Papa Parrain,
RépondreSupprimerMerci pour ta plume qui me donne toujours envie de lire des mots. Je sens ta joie avec les enfants qui te le rendent bien. Une vie bien remplie de petits et grands bonheurs et ton rôle de Papa et Parrain est merveilleux.
Quel beau cadeau du ciel d'avoir des enfants qui savent nous offrir leur confiance, leur sourire, leur gaîté.
Merci Pierre pour ce magnifique centième article tout en te souhaitant une très douce continuation pour notre plus grand plaisir.
Bises pour l'occasion et en pensées, reçois un petit brin de muguet.
Agréable week-end :-)
Merci Denise pour tes mots qui donnent toujours envie d'écrire des mots...
SupprimerMerci aussi pour le brin de muguet, qui vient combler l'absence des miens - floraison en retard cette année...
Bises d'amitié
Pierre.
Bravo Pierre d'avoir réussi là où j'ai échoué.
RépondreSupprimerJ'ai voulu faire "comme tout le monde" mais on ne nait pas parent, on le devient. Car être "maman", si c'est une évidence pour certaines, ne l'était pas du tout pour moi.
Beau premier mai,
Dominique
Je suis convaincu de ce que tu écris. Être parent, maman ou papa, n'est jamais une évidence de principe, ni une obligation. C'est une impression strictement personnelle. Chacun sait - ou ne sait pas -, voilà tout.
SupprimerBeau premier mai, oui.
Pierre.
C'est toi qui nous donnes à voir la beauté du monde et des mots article après article (félicitations pour ton centième, j'espère qu'il y en aura encore beaucoup d'autres) ! Tu dois être un paparrain génial :) De mon côté, j'ai toujours su que je voudrais être maman, et à l'aube de mes quarante ans, même si j'ai eu une forte remise en cause à la naissance de ma première fille, aujourd'hui, ce rôle de maman et ces petits sourires pétillants pleins d'innocence et de gentillesse m'épanouissent tellement que je me dis que je réitérerais bien l'expérience une troisième fois avant de ne plus pouvoir du tout... Et ton article vient encore plus titiller ce désir latent !
RépondreSupprimerJe te souhaite un très joyeux Premier-Mai !
Je comprends. Je suis à la même aube et j’ai la même tentation de devenir père une dernière fois. Il me reste quelques années pour rêver, mais je n’imagine pas ne pas connaître une fois encore la joie infinie de tenir un bébé dans mes bras et de le sentir grandir tout doucement contre moi.
SupprimerBon week-end - après la pluie, le soleil.
Pierre.
Bravo pour tes cent articles! Tes articles sont pleins de poésie, de tendresse et de sagesse. Ton identification avec le rôle de père est tellement forte et communicative. Je ressens la même chose même si je ne sais pas l'exprimer et même si mes enfants et petits-enfants sont loin et pour le moment inaccessibles. Bon weekend à toi Pierre le Papa et à ta famille bien sûr.
RépondreSupprimerMerci Judith !
SupprimerIdentification est le bon terme. On m’a déjà dit d’ailleurs que c’était excessif et qu’il fallait aussi exister pour soi, mais ça, je ne sais pas faire, en toute franchise. Et ça me va très bien comme ça.
Ça doit être très dur d’être loin de ses enfants et petits-enfants, mais je ne doute pas que la vie te donnera l’occasion de rattraper ces temps contrariés.
Amitiés !
Pierre.
Hello! Je tente une dernière fois de poster un message (2 échecs ce matin).
RépondreSupprimerTu as un réel talent pour exprimer les choses de la vie.
Je te souhaite un très beau premier mai.
Merci ! Le message est arrivé à destination !
SupprimerJ’adore écrire les sentiments et les sensations que la vie m’offre. J’ai l’impression de pouvoir ainsi partager la joie immense qui est la mienne.
Bon dimanche sous un timide soleil.
Pierre.
Au fil de cette centaine d'articles (incroyable ! et on ne s'en lasse pas, au contraire), l'on a pu découvrir combien tu étais un père extraordinaire, ce rôle te colle à la peau, te lie viscéralement, et en plus tu nous dévoiles que tu es également un parrain comblé, quelle vie bien remplie avec cerise sur le gâteau ton talent des mots. Au passage j'adoooore le dessin de ton enfant ! Des bizzzzh au parfum de muguet mon cher Pierre.
RépondreSupprimerBonjour Maryline,
SupprimerMerci ! Oui, ma guitariste dessine beaucoup, et je la sollicite à présent régulièrement pour illustrer mes articles ! Je vais lui transmettre ton message, elle sera heureuse et encouragée.
Bises !
Pierre.
un billet du coeur, être papa est une immense responsabilité. il faut être là à tous les instants et comme pour une maman, c'est un questionnement perpétuel mais je te sens bien en phase avec cette majuscule, Papa ou Parrain, le lien est si proche..
RépondreSupprimerC'est tout à la fois un questionnement et une évidence.
SupprimerMerci Sedna,
Bonne semaine,
Pierre
Etre Papa, c'est donner de son temps, avec amour. Etre Parrain ou Marraine, c'est être prêt à s'occuper d'un enfant. J'ai été marraine la 1ère fois à 11 ans et demi, j'étais fière que la soeur de ma mère me le demande, j'ai accepté. D'autant que le filleul en a eu besoin, sa mère a dû partir en sanatorium dès sa naissance et ma mère (ainsi que moi) s'en est occupé pendant un an. Bonne semaine.
RépondreSupprimerOui, c'est une fierté et un honneur - à quelque âge que ce soit.
SupprimerBonne semaine !