lundi 7 août 2017

Réponse du jardinier à la bergère

Dans un précédent article, j'ai abordé l'épineuse question de la cohabitation plus ou moins pacifique qui s'établit entre les enfants et le jardin. Aujourd'hui je vais étudier la question infiniment plus épineuse (pour vous donner une idée de la différence, on passe du rosier au pyracantha) de la guerre ouverte qui oppose souvent le jardin à son chien. Car le chien doit appartenir au jardin, et non l'inverse. Sinon, c'est la fin des haricots. Des haricots et de toutes les autres plantes.

I. Le jardin a une âme ; peut-on en dire autant du chien ?

 

une joli blonde bouclée et un berger allemand élégant et sympathique
La belle et la (belle) bête
Aussi étrange que cela puisse paraître, le chien semble complètement insensible à la beauté du jardin. Pour lui, une ortie est sensiblement équivalente à un iris ensata. Dans sa tête de chien, c'est kif-kif. Pour éveiller l'intérêt du chien, il faudrait cultiver un hybride entre un pommier et un sac de croquettes. Pas évident, je vous l'accorde. 


Voilà expédiée la question de la sensibilité au beau chez nos amis à quatre pattes. Passons maintenant à l'aspect pratique de la chose.

II. Le supplice du jardin.


Le chien n'a aucune raison particulière de respecter votre jardin. Il va donc passer ses journées à y faire des trucs de chien : détruire votre plus beau massif d'hydrangeas en poursuivant sa maudite baballe, creuser un trou au milieu des rosiers pour cacher ladite baballe, croquer des bourdons à même la lavande - et la lavande avec -, manger votre gazon anglais pour se purger et enfin, le temps de digérer toutes ces bonnes choses, confondre vos plus élégants couvre-sols avec ses toilettes privées. Bref, il va saloper en une après-midi trois saisons de travail. Convenons ensemble que c'est un tout petit peu pénible, même pour les plus patient(e)s d'entre-nous. Alors comment faire ?  


III. Voici le SOS d'un jardin en détresse. 


Il n'y a évidemment pas de solution miracle. La seul à même de fonctionner à coup sûr consisterait à ne pas avoir de chien. Seulement, quand on a des enfants et une maison, je crains que ce ne soit mission impossible. En ce qui me concerne, chaque année, au moment de son anniversaire, je devais expliquer à ma fille que nous ne pouvions pas adopter un chien dans un appartement car il serait malheureux. Une poignée d'anniversaires plus tard, j'achetais la maison de nos rêves... alors évidemment, à peine nos valises posées dans l'entrée, elle me demandait d'un air faussement candide : "nous allons chercher le chien maintenant ou nous prenons le goûter avant ?". Comme je suis un être aussi insensible qu'inflexible, j'ai répondu : "Après le goûter". Trois tartines plus tard, nous ramenions de la SPA un chien prêt à rendre mes enfants heureux et à détruire mon jardin. 

Alors voilà, nous y sommes : le chien est là et il me faut préserver mon jardin. Le hic, c'est que toutes les solutions un tant soit peu efficaces me feraient immédiatement passer aux yeux de mes enfants pour un être cruel et mauvais (en plus d'être insensible et inflexible, ce qui fait quand même beaucoup). Construire un chenil n'est pas envisageable, laisser le chien à l'intérieur non plus, le dresser à faire la distinction entre une agapanthe et un pissenlit serait peine perdue. Alors que faire ? Bétonner les jardin ? Bétonner tous mes rêves de jardinier ? Bétonner le chien ? 

IV. Sport, always.


Est-ce une biche là-bas au fond ? Mais oui... Miam !
J'ai finalement eu une illumination. Une solution sans béton. Mais surtout, une solution en béton armé. Basée sur un constat simple : le principal danger du chien provient de l'alchimie particulière entre son énergie inépuisable et sa propension à ne rien comprendre au jardinage. Agir sur la seconde me paraissait dépasser largement mes compétences de pédagogue, aussi me suis-je attaqué à la première. Alors voilà : tous les matins, je me lève à l'aube, j'enfile mon plus beau pantalon de toile, une veste de survet', une paire de chaussure de marche, et je m'en vais épuiser la bête dans les collines attenantes au jardin. 

Trois quarts d'heure de balade. Au pas de course. Dans la forêt. 

Ce sont les trois ingrédients de ma recette. Et le soir, rebelote. Après ça, l'inépuisable sportive passe le plus clair de son temps à roupiller sur son tapis avec son canard en peluche. Moi aussi, cela dit - le canapé en plus et le canard en peluche en moins.

Un berger allemand fatigué se repose avec son canard d'amour
Alors, la terreur, on se repose ?
Pendant ce temps-là, les tomates poussent, la lavande fait la bronzette, les céanothes dansent la rumba. Ainsi, mon jardin n'est (presque) pas abîmé par les assauts de son pire ennemi - avec la taupe, dont je traiterai dans un troisième chapitre. Et le pire, c'est que le temps passant, les promenades complices aidant, mes sentiments pour cette brave bête enflent à vue d’œil. Bientôt, quand je serai prêt, je lui confierai un sécateur et lui apprendrai l'art de la taille. On peut toujours rêver.

Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt pour rêver.

10 commentaires:

  1. Très bonne méthode, contraignante, mais bonne !
    Il y en a une autre: le chat ;-)
    Aude.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci pour l'astuce ! Je vais opter pour une solution intermédiaire : je vais faire croire à ma chienne qu'elle est une chatte. Elle prend tout ce que je dis pour croquette comptante.

      Geontran.

      Supprimer
  2. noua avions un chien autrefois, plus les années passaient et plus le jardin se portait bien, l'énergie de la "bestiole" décroit, heureusement! nous avons plein de chats au jardin, et les dégâts ne sont pas les mêmes, heureusement aussi! juste quelques oiseaux (dire que je les nourris en hiver :_)), et des musaraignes en moins sur terre...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai dans mon jardin quelques musaraignes que je tolère (sans aller jusqu'à les nourrir), et des oiseaux, nombreux comme dans une volière, mais libres, si jolis libres, libres de se poser et de retourner dans leur ciel quand bon leur semble. Eux, je les nourris. Je peux pleurer en regardant un rouge-gorge m'approcher en penchant la tête. Mais chut ! C'est un secret.

      Supprimer
  3. J'imagine très bien, j'ai une amie dont le jardin est dans un état, elle ne peut plus rien faire dans son jardin. Elle en a 2 plus lourds qu'elle, c'est un peu compliqué pour les grandes balades...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Deux, je crois que je ne saurais pas faire face ! J'imagine très bien : pendant qu'on essaie d'empêcher le premier de manger un bourdon (et la moitié du plant de lavande avec) l'autre entreprend de creuser un trou pour planquer son os. Terrifiant ! Les grandes balades, c'est une réelle contrainte. J'ai mis une année entière à en faire un plaisir : au début ma chienne tirait comme une forcenée, aboyait sur tous les êtres vivants qui passaient à portée de gueule... Aujourd'hui, c'est beaucoup plus facile et nous partageons vraiment ce moment.

      Supprimer
  4. Oh là là ! Mon mari et les enfants veulent un Bouvier bernois. Je tiens tête ! Pas question de craquer au risque de devenir une harpie à la maison ! Un chat c'est très bien et ça fait sa vie.
    Ceci dit, tes balades quotidiennes ont l'avantage de te tenir en pleine forme. Moi qui me plains de passer trop de temps assise en voiture ou au bureau derrière mon ordi, un chien entretiendrait ma ligne ;-) Mais comment trouves-tu le temps de tout faire !?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je ne le trouve pas : je le prends ! (et ne dors pas beaucoup...)

      En fait, je crois que j'ai pris la mauvaise habitude de ne jamais avoir de temps vacant. J'adore ma chienne, il me serait à présent difficile d'imaginer ma maison sans elle (et même mon jardin et sa lavande à moitié mangée !). Mais je regrette parfois ce temps que je n'ai plus pour m'asseoir dans mon meilleur fauteuil et ne rien faire d'autre que d'y être assis.

      PS. Les bouviers bernois sont des chiens extraordinaires. Le jour où tu céderas (on cède toujours :-)) tu te consoleras en te disant que c'est un très bon choix.

      Supprimer
  5. Comme d'habitude très sympa ce post, un moment pourtant quand j'ai lu pas de chien à l'intérieur çà m'a fait mal mais heureusement de la voir allonger sur son tapis sur le carrelage m'a rassurée, nous avons perdu notre chienne BG en novembre dernier et c'est bien dur. Par ailleurs, d'autres bêtes font tellement de dégâts ici au jardin (taupe, mulots, chevreuils, rabbits ou passage de sanglier que ... !!! On relativise et puis le chien c'est vraiment le meilleur ami de l'homme non ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. En fait, je me suis mal exprimé : je voulais dire qu'il n'était pas question que ma chienne restât enfermée à la maison. Elle doit pouvoir sortir se dépenser.

      Pour tout te dire, elle a une grande pièce pour elle toute seule - même si elle préfère venir s'allonger dans le salon quand nous y sommes...

      Je suis désolé pour ta chienne ; oui, ils sont le meilleur ami de l'homme et leur fidélité est sans limite. Ils nous rendent bien plus qu'on leur donne.

      Bonne soirée Maryline,
      Geontran.

      Supprimer

Au pied du camphrier

Chères lectrices, lecteurs, Après bientôt quatre ans, agapanthes & camphrier va fermer sur ces dernières lignes. J'ai décidé de mig...