jeudi 12 novembre 2020

Un kilomètre à pied

Alors que le confinement bat son plein, je continue d’explorer le cercle, minuscule et immense, dont mon domicile est le centre et qui compte dans son rayon contraint : un petit morceau de forêt, une rivière, un étang. 

S'il n'use guère les souliers, ce kilomètre à pied assouplit la lisère des rêves. La flore qui habite ce royaume en apparence limité tiendrait à peine dans un livre épais. Et la faune qui l'anime justifierait un deuxième tome, d'un volume au moins égal au premier... Voilà que je perçois la possibilité d'une mélodie inédite : variations sur un infini confiné.

Car finalement, les frontières n'existent que dans la logorrhée administrative d'une humanité inquiète : "Déplacements brefs, dans la limite d'une heure quotidienne, et dans un rayon maximal d'un kilomètre autour du domicile, liés à la promenade avec les seules personnes regroupées dans un même domicile". 

Je crois qu'il nous manque une case, à tout le moins.

Alors j'en ai ajouté une - aussitôt cochée : "Jeu de la marelle : sauter de cercle en cercle, de joie en joie, pour faire de la nature son domicile et s'affranchir des distances sans manquer à ses devoirs."

C'est mieux ainsi, n'est-ce pas ?

À présent, j'explore un monde qui s'ébroue tout entier sous mes semelles. Je marche lentement, la tête penchée, attentive et curieuse, le regard absorbé par une proximité chatoyante. La main de mon fils serre doucement la mienne ; son étreinte se fait plus forte, émue et tendre, à mesure qu'apparaissent les merveilles qui jalonnent notre chemin.

Comme l'a joliment écrit une lectrice de ce blog, les joies vécues en compagnie d'un enfant comptent double. Voici la liste des bonheurs démultipliés que j'ai connus à la faveur de ma dernière balade, étant entendu que leur intensité doit être multipliée par deux pour en mesurer parfaitement la saveur :

Un corymbe de soleils doux

Une coccinelle se riant des orties

Un pavot sur ressort

Une charmille au charme marcescent

Une berce, se berçant d'illusion, célèbre son printemps

Quelques éclats de la peinture écaillée du ciel d'été

Un pied de nez de l'automne à l'hiver : flocons de symphorine

Une grappe de douceur houblonnée

Une jardinerie sauvage

Une plante à l'échelle

Un coucher de soleil

Un rivage malvacé






23 commentaires:

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    1. Bonjour !

      À l'image de la coccinelle, nous pouvons caresser les orties - pourvu qu'on le fasse dans le sens du poil (urticant) ; et c'est là un vrai plaisir.

      Je vous souhaite une belle journée.
      Geontran.

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  2. Coucou Geontran et p'tit piou
    Une belle ballade en votre compagnie, qu'elle fut belle l'histoire de ce vent de liberté, il souffle un peu plus fort s'il en est à mesure que s'étendent les limites de notre évasion, il est loin le temps où nous étions libres d'aller et venir, heureusement, il nous reste ces coins de nature où il fait bon profiter de cet automne bien joli avec sa myriade de couleurs, je plains assurément ceux qui n'ont pas ce loisir
    Oui parce qu'il est bien beau cet automne après tout, profitons en
    Belle journée de vendredi dans la grisaille d'un jour d'automne (justement)
    Amitiés automnales champenoises, la nature est belle ici

    PS pas de newsletter dans ma boite mail, blogger fait des siennes

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    1. en vérifiant dans ma boite mail, j'avais bien ta newsletter affichée, youpi...

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    2. Une évasion ; c'est là un joli rêve. Les entorses à notre liberté donnent des envies d'aller et venir sans frontière.

      Ici on fait de notre mieux pour rester dans les limites autorisées, mais je reconnais qu'au milieu de la forêt, un kilomètre ressemble tellement au kilomètre suivant qu'on s'y trompe parfois...

      Bises d'un lundi plutôt doux !

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  3. Que de richesses dans la nature environnante! Et une grande surprises aussi, un pavot en fleur est une rareté à chérir. Encore plus rare avec sa tige en colimaçon! Quelle chance d'avoir un bout de forêt, une rivière et un étang si près de chez toi. Un vrai paradis pour des balades avec ton fils. Belle journée Geontran

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    1. Ce pavot était une surprise étonnante ! Un cadeau du vent. Il a dû vriller ainsi pour éviter une feuille, chercher le soleil. Le résultat est tellement singulier, adorable et surprenant !

      Belle journée, lundi joli, Judith
      Geontran.

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  4. Bonjour Geontran,

    Ton texte aux mots doux est une merveille de poésie où chaque pas dans ton jardin, dans la forêt, l'automne te fait découvrir ses trésors, ses merveilles, ses senteurs. Ce sont des promenades qui réconfortent main dans la main avec ton fils. Découvrir la nature à deux n'est que du bonheur.

    Je suis tout à fait d'accord avec toi pour l'ajout d'une "case", c'est joliment dit "jeu de la marelle".

    Merci pour cette magnifique brassée de fleurs diverses avec une coccinelle en prime.

    L'automne nous réserve encore de belles surprises, profites-en au maximum.

    Douce fin d'après-midi avec mes amitiés.

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    1. Bonjour Denise,

      Kilomètre par kilomètre, heure après heure, ça finit par faire de jolis jeu de marelle !

      L'automne bat son plein, pour notre grand plaisir !
      Doux début de semaine,
      Geontran

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  5. Bonjour Geontran,
    super, les newsletters de ton blog arrivent bien sur ma boîte mail ! j'ai lu avec plaisir tes derniers articles, tu as de la chance d'avoir ce coin de forêt et de campagne dans ton périmètre de sortie. J'ai également cette chance (je suis tout près de la Rance, et il y a un bois), et c'est un bonheur d'y aller avec mon fils. Toi et ta si jolie famille êtes les bienvenus pour faire une pause lors d'une prochaine visite en Bretagne, la mer doit te manquer j'imagine. Bon week-end !

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    1. Bonjour Céline,

      Je note la proposition, ce serait avec grand plaisir. Oui, notre environnement est une chance aujourd'hui plus encore. Mais finalement, il n'y a là de chance que celle que l'on a provoquée : nous avons choisi.

      Rivière et bois ; c'est là mon duo gagnant à moi aussi. Le bois pour le mystère, la balade ; la rivière pour la paix de son courant.
      Bonne journée !
      Geontran

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  6. C'est un kilomètre en spirales, en volutes, en raccourcis...Comme toi , j'ai la chance d'avoir des morceaux de bois, un morceau de rivière, des morceaux d'automne dans mon kilomètre...Même les petits morceaux de routes sont pleins de la jonchée automnale des feuilles mortes...Pourtant, un stakhanoviste du béton et de la "propreté " , avec beaucoup de conviction et de bruit, était en train de refouler la beauté à grand bruit de soufflerie, pour rendre la petite route, grise et béton. je suis insolente, alors, je l'ai croisé avec un sourire et j'ai dit : "dommage, c'était plus joli avant"...Il a dit, sourire disparu : "mais vous voulez glisser et tomber" ? les feuilles sont devenues danger, l'ai que l'on respire est devenu danger, la vie est devenue danger...j'avoue qu'il m'a un peu assombri mon automne tout à l'heure...Alors, ça tombe bien , je viens de la rendre plus clair à la lecture de ton article !

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    1. Les ramasseurs fous de feuilles sont légion. Mon voisin règle tous les jours son compte au tapis mordoré de la cours de notre copropriété... Son jardin est fait de béton "tellement plus pratique"... Il a l'air sincère, ce qui est plus désarmant encore.

      Tout est danger, oui, c'est là la triste ambiance de moment. Heureusement, tout est beauté pour qui sait regarder !

      Bonne journée, Capucyne, entre faune et flore comme tu sais si bien le faire !

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  7. Même dans un aussi petit rayon il y a toujours à s'émerveiller quand on est dans la nature et en si bonne compagnie comme tu l'es cher Geotran !Prenons en de la graine et réinventons nous la vie autrement le temps du confinement. Un grand merci pour ton passage sur mon blog qui m'a fait chaud au cœur. Bonne soirée dominicale. Bizzzzzh.

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    1. C'est vrai : l'infini tient dans une cuillère à café de terre du jardin. Passer sur ton blog est un infini plaisir pour le promeneur que je suis.

      Bonne semaine qui commence, sous les feux de l'automne.
      Geontran.

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  8. Bonsoir Geontran: Comme vous j'ai la chance de rayonner dans un cercle boisé et coloré. C'est dingue le fourmillement de vie dans un si grand cercle. Finalement nos bons conseilleurs devraient restreindre le diamètre de nos ébats quotidiens à celui de quelques cercles de jeu de la marelle. Merci de votre dernier passage sur Regards croisés de Canardjaune. Bonne semaine à vous et votre cher enfant trésor de joies simples. Mon petit bout de bonheur gambade avec sa maman en Auvergne. En temps que papy, lorsque je suis en sa compagnie le temps se démultiplie. Les découvertes explosent. Les rires s'allument à l'infini.

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    1. Les rires s'allument à l'infini : cette image est un sourire sur mots. Ainsi sont les enfants, et tous ceux qu'ils rendent un peu plus heureux.

      Merci de votre passage ici ; merci pour vos phrases délicates.
      Geontran.

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  9. Il y a de quoi regarder en effet, on a le temps de bien voir toutes ces choses qu'on ne regarde pas en temps ordinaire où on est pressé. On se régale car on veut voir le plus de choses en 1 h. Bonne soirée. Bonne semaine.

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    1. Merci Elisabeth,

      L'heure en dure mille quand on la parcourt lentement. Et brille d'autant de feux.

      Bonne journée ; retour d'un peu de pluie ici.

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  10. Quel beau texte, je l'ai relu plusieurs fois avec grand plaisir.
    Tout change en permanence à la campagne, je l'observe chaque jour, tiens, même la coccinelle n'y est plus:-)
    Merci beaucoup, bonne soirée.

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    1. Chère Colo, merci.

      Si la coccinelle n'y est plus, c'est qu'elle vole quelque part... pour mieux s'y poser à nouveau. Ou peut-être est-elle passée sous la feuille suivante, pour atteindre une meilleure piste d'envol. Les coccinelles semblent joyeuses de colorer la nature de toutes petites touches de peinture. Cette joie se reflète dans nos yeux.

      Oui, la campagne est un mouvement tranquille, une révolution douce. Ce que l'on croit immobile fourmille à y regarder de près !

      Bonne journée !

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  11. J'aime bien et je coche la toute dernière formule de l'attestation de sortie.

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    1. Plus on est de joueurs et de joueuses, mieux la marelle nous entraîne de balades en promenades ! Comme vous, pas un jour sans que je ne profite de l'air frais et de ma liberté.

      Je suis heureux de vous lire, ici comme chez vous.
      Bonne semaine,
      Geontran.

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